Akasha
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| Sujet: Le Tibet au temps des dalaï-lamas Lun 21 Mar - 22:27 | |
| Le Tibet au temps des dalaï-lamas
En 1935, le professeur Giuseppe Tucci parcourt le Tibet Occidental, l’ancien royaume indépendant du Zhang zhung. Les observations de l’explorateur Italien corroborent l’extraordinaire déclaration de Trungpa, lama sans langue de bois, qui disait au sujet du Tibet de son enfance : « Plus personne ne pratiquait réellement, c’était une grosse arnaque. Pas étonnant que les communistes aient décidé de prendre le pouvoir, ils avaient raison de ce point de vue. » Les 28-30 juin 1935, le professeur Tucci est à Taklakot, il écrit :
« Par nature, le Tibétain est un commerçant ; il cherche à tirer profit de la plus petite bagatelle et, il faut bien l’avouer, les meilleurs marchands sont les prêtres. Aussi de nombreux moines abandonnent l’oisiveté du monastère pour se lancer dans l’aventure du commerce. […]
Mais ce n’est pas dans les monastères que se perpétuent les trésors spirituels de l’expérience bouddhiste : le symbolisme du rite auquel nous avons assisté fut imaginé par des ascètes inconnus afin d’évoquer chez l’initié des renaissances libératrices.
La cérémonie, à laquelle ne prenaient part à l’origine que le maître et le disciple, prédisposait à une lente ascension vers des états spirituels de plus en plus élevés. Mais, par la suite, transférée au sein de l’immense communauté religieuse, elle perdit petit à petit sa signification symbolique et son efficacité psychologique ; le rite initiatique et ésotérique évolua vers une forme souvent vide de contenu.
Une déchéance semblable à celle qui ruina la vie politique du pays se reflète dans la vie religieuse : aux anciennes ardeurs mystiques, qui firent de ces contrées un des pays les plus renommés dans l’histoire du bouddhisme, s’est substitué le culte aveugle de la forme pour la forme. Même le temple que nous visitons est triste, sale et mal entretenu ; les peintures religieuses sont entassées en vrac, déchirées et crasseuses. Les livres sont rares ; enroulés dans des bouts d’étoffes poussiéreuses, nul ne les ouvre ni ne les lit et ne saurait davantage en comprendre le sens.
Les mœurs aussi sont quelque peu relâchées ; les moines de la secte jaune doivent respecter scrupuleusement les vœux de chasteté, de ne pas manger de viande, ni boire d’alcool. Mais ceux des différentes sectes rouges, tels les Sakyapa qui vivent dans ce monastère, sont moins orthodoxes. Les occasions de fauter ne manque pas. Les couvents des nonnes sont presque toujours adossés à ceux des moines et les religieuses souvent très jeunes et très gracieuses. Elles sont préposées au service des monastères, portent l’eau, préparent les repas, nettoient, vont et viennent librement. »
Taklakot, le 3 juillet 1935 :
« D’une manière générale, les prix des objets sacrés me semblent moins élevés dans cette région que dans les autres, peut être parce que la mauvaise administration des préfets a tellement appauvri la population qu’elle ne veut pas perdre l’occasion de faire un bénéfice, aussi petit soit-il. Comme toujours les moines refusent les pièces tibétaines et veulent être payés en monnaie indienne ou en thalers chinois, ou encore en compani du Népal. Plus d’une fois, les mendiants ont dédaigné l’aumône en monnaie tibétaine. La crise monétaire de Lhasa est très grave : on en ressent les répercussions jusque dans ces contrées lointaines. »
Tchiu, le 10 juillet 1935 :
« Le monastère de Tchiu se dresse comme un fortin sur une colline escarpée au bord de l’eau : des murailles écroulées, des petits murs de pierres sèches servant d’enclos pour les troupeaux, deux chapelles peintes en rouge, trois tchörten, une atmosphère de pauvreté, de saleté et d’abandon. Le monastère qui appartient à la secte Drukpa est entretenu par un moine dont les occupations sont à la fois sacrées et profanes. Il récite des prières dans son temple et cherche à s’enrichir par le négoce ; il a femme et enfants et enseigne à deux ou trois moinillons la liturgie et l’art du commerce. »
Langpona, le 11 juillet 1935 :
« Le monastère de Langpona appartient lui aussi à la secte Drukpa et plus exactement à un lama incarné qui réside au gompa de Khorzog, dans le district du Rupshu ; on dit de lui qu’il est doté de nombreux pouvoirs magiques et qu’il est très doué pour le commerce. »
Barkha, le 20 juillet 1935 :
« Nous campons à Barkha où se trouve une maison et de nombreuses tentes. La maison est habitée par le Targium et ses soldats, sorte de sous-préfet chargé surtout de faire respecter l’ordre ; un second se trouve à Tokchen, à l’est du Manasarovar. «
« Hier au soir, ils ont justement arrêté quatre brigands. Deux d’entre eux se sont enfuis pendant la nuit en pratiquant une ouverture dans le toit de la prison et les deux autres ont eu droit à un procès. Le magistrat a convoqué les notables, les fonctionnaires et les soldats ; ni l’habillement, ni les traits du visage ne permettent de distinguer ces derniers des brigands. L’acte d’accusation n’est suivi d’aucune défense mais d’un interminable panégyrique de vertu qui fait couler de chaudes larmes de repentir sur ces visages patibulaires et pour finir deux cents coups de fouet sont infligés aux coupables. Le butin confisqué n’est pas restitué et part enrichir les profits du préfet de police. »
Toling, le 18 août 1935 :
« Abbé et tchagdzö (administrateur) vivent dans l’enceinte même du monastère, sous le même toit. L’un donne des ordres, l’autre médite ; l’administrateur s’agenouille devant l’abbé et, quand il s’adresse à lui, c’est avec toute la finesse du style honorifique : » joyau parmi les maîtres, océan de sagesse, seigneur suprême « , mais en fait, il agit comme bon lui semble et ne tolère aucune ingérence du pouvoir spirituel dans ses affaires. »
« Au cours de mes longues haltes à Toling, j’ai pu réaliser combien l’antagonisme est violent entre ces deux hommes, à tel point que l’un suspecte continuellement l’autre et le fait surveiller par des serviteurs de confiance qui excitent les rivalités, font courir des bruits, épient et dénoncent. Une atmosphère d’hypocrisie se dégage du monastère mais le tyran est, sans l’ombre d’un doute, l’administrateur avide d’argent et d’autorité, sans culture ni scrupules, et naturellement jaloux du prestige que, malgré tout, sagesse et vertu confèrent à l’abbé qui lui, vit dans une terreur presque constante de l’autre. »
Piang Dunkar, le 25 août 1935 :
« Ici, vivait un peuple fervent, des âmes nobles, ivres de renaissances mystiques, qui s’élevaient jusqu’au sublime grâce à des ascèses et des contemplations ; des artistes qui savaient créer des œuvres dignes d’être comparées aux plus grands chefs-d’œuvre de l’Orient, des rois pieux sous le règne desquels le pays prospéra et s’ennoblit. Aujourd’hui, non seulement tout signe de vie a disparu, non seulement les sables et le silence du désert engloutissent et détruisent les dernières œuvres de l’homme, mais encore la déchéance a pris possession de l’âme des rares survivants ; je dirais même que, comme toujours, la mort de l’esprit a précédé celle des choses. »
Le récit du professeur Tucci, publié en 1937, rejette catégoriquement le mythe du peuple tibétain vivant heureux avant l’invasion chinoise.
« SADHUS et BRIGANDS du KAILASH » de Giuseppe TUCCI, Editions R. Chabaud.
La grande misère du peuple tibétain
Pour en savoir plus : Critique du lamaïsme et du servage. SOURCE : http://bouddhanar.blogspot.co.il Vous pouvez partager ce texte à condition d’en respecter l’intégralité et de citer l’auteur, la source et le site : http://www.elishean.fr/ | |
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